2.

2.2 Il convient en premier lieu d'examiner à quelle masse la villa conjugale doit être rattachée.

2.2.1 Pour la détermination du bénéfice de chaque époux (cf. art. 210 CC), les acquêts et les biens propres de chaque époux sont disjoints dans leur composition au jour de la dissolution du régime (art. 207 al. 1 CC). Tous les biens qui constituent la fortune des époux doivent être attribués à l'une ou à l'autre masse (ATF 125 III 1 consid. 3; ATF 121 III 152 consid. 3a). Chaque bien d'un époux est rattaché exclusivement à une masse et à une seule (SANDOZ, La créance de plus-value de l'art. 206 CC grève toujours les acquêts du conjoint débiteur, in RDS 113/1994 I p. 433 ss, 434 et les références citées).

2.2.2 Si l'acquisition d'un bien est financée par les deux masses de l'époux acquéreur, ce bien doit être intégré dans la masse à laquelle peut être rattachée la partie la plus grande; la masse à laquelle le bien n'est pas intégré a une récompense (variable) égale au montant de sa contribution, conformément à l'art. 209 al. 3 CC (ATF 131 III 559 consid. 2.3 et les références citées; DESCHENAUX/STEINAUER/ BADDELEY, Les effets du mariage, 2000, n. 1037 et 1368; HAUSHEER/ REUSSER/GEISER, Berner Kommentar, Bd. II/1/3/1, 1992, n. 50 ad art. 209 CC; HAUSHEER, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 2e éd. 2002, n. 25 ad art. 209 CC).

2.2.3 En revanche, si l'acquisition d'un bien est financée par une seule des masses de l'époux acquéreur, le bien est rattaché à cette masse; si des montants provenant de l'autre masse sont ultérieurement investis dans l'amélioration ou la conservation de ce bien, ils n'en modifient pas le rattachement, même s'ils sont supérieurs à la valeur du bien (DESCHENAUX/STEINAUER/BADDELEY, op. cit., n. 1367; SANDOZ, op. cit., in RDS 113/1994 I p. 434; HAUSHEER/REUSSER/ GEISER, op. cit., n. 50 ad art. 209 CC). En effet, l'appartenance d'un bien à une masse est en principe immuable et doit être déterminée au moment où le bien en cause entre dans le patrimoine du conjoint acquéreur (PIOTET, L'acquisition, dans le régime matrimonial de la participation aux acquêts, d'immeubles avec reprise ou création de dettes hypothécaires, in RNRF 68/1987 p. 1 ss, 5). Ainsi, si un terrain à bâtir est acquis avec des fonds provenant d'une masse, il reste rattaché à celle-ci même si le bien-fonds est ensuite bâti avec des
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fonds provenant de l'autre masse et que la valeur de la construction excède de loin celle du sol (HAUSHEER/REUSSER/GEISER, op. cit., n. 50 ad art. 209 CC).

2.2.4 En l'espèce, il est constant que le bien-fonds sur lequel a été ultérieurement érigée la villa conjugale a été acquis au moyen de fonds qui constituaient des biens propres du mari en vertu de l'art. 198 ch. 2 CC. Cet immeuble doit donc être rattaché aux biens propres du demandeur (art. 198 ch. 4 CC), contre lesquels les acquêts du demandeur, du fait qu'ils ont contribué à l'amélioration ou à la conservation de l'immeuble, ont une récompense variable.

2.3 Il convient dès lors de calculer le montant de cette récompense.

2.3.1 Selon l'art. 209 CC, il y a lieu à récompense, lors de la liquidation, entre les acquêts et les biens propres d'un même époux lorsqu'une dette grevant l'une des masses a été payée de deniers provenant de l'autre (al. 1). Une dette grève la masse avec laquelle elle est en rapport de connexité ou, dans le doute, les acquêts (al. 2). Lorsqu'une masse a contribué à l'acquisition, à l'amélioration ou à la conservation de biens appartenant à l'autre masse, la récompense, en cas de plus-value ou de moins-value, est proportionnelle à la contribution fournie et elle se calcule sur la valeur de ces biens à la liquidation ou à l'époque de leur aliénation (al. 3).

2.3.2 Lorsque plusieurs masses ont contribué à l'acquisition, à l'amélioration ou à la conservation d'un bien au sens de l'art. 209 al. 3 CC et qu'une partie du financement a été assurée par des tiers à travers une hypothèque, il se pose le problème de savoir comment répartir la plus-value ou la moins-value afférente au financement par ces fonds étrangers. En tant que dette, l'hypothèque grève la masse à laquelle est attribué l'immeuble, conformément à l'art. 209 al. 2 CC (ATF 123 III 152 consid. 6b/aa). Cela ne règle toutefois pas encore le problème de la répartition, entre la masse à laquelle appartient l'immeuble et celle qui a fourni une contribution au sens de l'art. 209 al. 3 CC, de la plus-value ou moins-value afférente au financement par crédit hypothécaire (ATF 123 III 152 consid. 6b/bb in limine). Selon la jurisprudence, celle-ci doit être répartie proportionnellement entre les diverses masses qui ont financé l'acquisition, l'amélioration ou la conservation de l'immeuble (ATF 123 III 152 consid. 6b/bb).

2.3.3 En l'espèce, postérieurement à l'acquisition du bien-fonds, qui a été payé 39'250 fr. au moyen des biens propres du demandeur,
BGE 132 III 145 S. 151
les acquêts de ce dernier ont contribué à l'amélioration ou à la conservation de ce bien à deux égards: d'abord en payant une partie de la construction de la villa, à concurrence de 118'000 fr. (348'000 fr. [prix de revient de la construction] - 230'000 fr. [crédit hypothécaire]), puis en amortissant la dette hypothécaire à concurrence de 45'756 fr. (230'000 fr. - 184'244 fr.). En effet, comme les amortissements sont des remboursements partiels de la dette, la masse qui a fait l'amortissement a droit au remboursement de ce qu'elle a versé, et elle participe à la plus-value et à la moins-value de l'immeuble, conformément à l'art. 209 al. 3 CC (DESCHENAUX/STEINAUER/BADDELEY, op. cit., n. 1384; cf. SANDOZ, Le casse-tête des créances variables entre époux ou quelques problèmes posés par l'art. 206 CC, in RDS 110/1991 I p. 421 ss, 424 et les références citées).

2.3.4 S'agissant d'un immeuble bâti, la plus-value se calcule sur la valeur du bien-fonds bâti. Il n'y a pas lieu de distinguer entre la valeur du terrain et celle du bâtiment, car l'immeuble forme un tout (DESCHENAUX/STEINAUER/BADDELEY, op. cit., note 32 ad n. 1285; cf. art. 667 al. 2 CC). En l'espèce, la plus-value totale prise par l'immeuble est de 134'750 fr. (522'000 fr. - 387'250 fr.), comme l'a constaté à juste titre l'autorité cantonale. C'est cette plus-value qui doit être répartie proportionnellement entre les biens propres et les acquêts du demandeur, de la manière que l'on va voir ci-après.

2.3.5 Compte tenu de ce que la construction de la villa a en définitive été financée à concurrence de 184'244 fr. par des tiers à travers une hypothèque, les biens propres et les acquêts du demandeur ont financé ensemble le prix de revient de la villa (387'250 fr.) à concurrence d'un montant de 203'006 fr. (387'250 fr. - 184'244 fr.). Ce montant se répartit comme suit entre les deux masses: 39'250 fr., soit 19.33 % (39'250 fr. : 203'006 fr.), pour les biens propres, et 163'756 fr. (118'000 fr. + 45'756 fr.), soit 80.67 % (163'756 fr. : 203'006 fr.), pour les acquêts (cf. consid. 2.3.3 supra).
La plus-value prise par l'immeuble, qui se monte à 134'750 fr. (cf. consid. 2.3.4 supra), doit donc être répartie entre les biens propres et les acquêts du demandeur à hauteur de 26'047 fr., soit 19.33 %, pour les premiers et de 108'703 fr., soit 80.67 %, pour les seconds. Les acquêts du demandeur ont ainsi contre ses biens propres une récompense qui s'élève, compte tenu de la participation à la plus-value selon l'art. 209 al. 3 CC, à 272'459 fr. (163'756 fr. + 108'703 fr.). On arriverait au même résultat avec un calcul de la récompense
BGE 132 III 145 S. 152
selon l'art. 209 al. 3 CC à partir de la valeur nette - c'est-à-dire après déduction de la charge hypothécaire - de l'immeuble (ATF 123 III 152 consid. 6b/bb in fine).
(...)